Syndic refuse documents : droits et recours
La communication des documents de copropriété par le syndic est une condition essentielle d’une gestion transparente et conforme au droit. Les copropriétaires, qu’ils soient membres du conseil syndical ou non, bénéficient de droits encadrés par la loi du 10 juillet 1965 et son décret d’application du 17 mars 1967, régulièrement modifiés, notamment par les lois ALUR et ELAN.
Mais que faire si le syndic oppose un refus ou tarde à communiquer ces documents essentiels ? Voici un point complet sur le cadre juridique, les droits des parties et les solutions en cas de blocage.
La communication des documents de copropriété
Une communication régie par le cadre légal
🔹 Le cadre général
L’article 18 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 impose au syndic de tenir à disposition de tous les copropriétaires l’ensemble des documents relatifs à la gestion de la copropriété.
En complément, l’article 21 de cette même loi, ainsi que l’article 26 du décret n°67-223 du 17 mars 1967, reconnaissent au conseil syndical le droit de consulter tous les documents relatifs à la gestion de la copropriété, sans restriction.
📌 Extrait de l’article 21 de la loi de 1965 :
« Le conseil syndical reçoit, sur sa demande, communication de toutes pièces ou documents se rapportant à la gestion du syndic. »
🔹 L’extranet obligatoire
Depuis la loi ALUR (2014) et renforcée par l’ordonnance du 30 octobre 2019, les syndics sont tenus de mettre à disposition des copropriétaires un espace extranet sécurisé, accessible 24h/24, contenant les documents suivants :
- Le règlement de copropriété et ses modificatifs
- Les procès-verbaux des 3 dernières assemblées générales
- Le carnet d’entretien de l’immeuble
- Les diagnostics techniques
- Les contrats et factures liés à la gestion de l’immeuble
- Le budget prévisionnel et les comptes approuvés
- Le plan pluriannuel de travaux (s’il a été voté)
Cette obligation figure dans l’article 18, I, alinéa 3 de la loi de 1965, ainsi que dans le décret n°2019-502 du 23 mai 2019.
La loi ELAN renforce ces dispositions en prévoyant des pénalités financières en cas de retard dans la transmission des documents. Si le syndic ne fournit pas les informations dans un délai d’un mois, il encourt une amende de 15 € par jour de retard. Cette sanction vise à responsabiliser les syndics et à réduire les tensions souvent liées à la communication des pièces.

Les droits des membres du conseil syndical
Le conseil syndical bénéficie d’un accès illimité et direct à l’ensemble des pièces de gestion. Cela comprend notamment :
- Les contrats conclus par le syndic
- Les factures
- Les appels de fonds
- Les relevés bancaires
- Les contrats de travail du personnel de l’immeuble
- Le registre des copropriétaires (même avec des données personnelles)
Contrairement à une idée reçue, le RGPD ne s’oppose pas à cet accès : la CNIL a confirmé que les membres du conseil syndical sont considérés comme agissant dans le cadre d’une mission d’intérêt légitime, ce qui permet la consultation de documents contenant des données personnelles, sous réserve de respect de la confidentialité.
📎 Référence CNIL : Avis CNIL 2022 – données personnelles et conseil syndical
Les membres du conseil syndical disposent d’un accès privilégié à l’ensemble des documents relatifs à la copropriété. Leur mission inclut le contrôle de la gestion du syndic, ce qui nécessite une totale transparence.
Cependant, cette consultation doit être organisée. Le conseil syndical doit informer le syndic des documents souhaités et convenir d’un rendez-vous pour leur consultation. Le syndic est responsable de la conservation des archives et ne peut autoriser leur retrait.
Les droits des copropriétaires non membres du conseil syndical
Les copropriétaires « simples » ont des droits plus restreints, mais néanmoins garantis par la loi :
- Consultation des documents préalablement à l’AG
L’article 11 du décret de 1967 impose au syndic de permettre la consultation des pièces justificatives des charges dans les 15 jours précédant l’assemblée générale, selon des modalités votées en AG (jours, horaires, lieu). - Accès à l’extranet
Comme vu plus haut, l’extranet permet une consultation libre de certains documents tout au long de l’année. - Droit d’information sur demande écrite
Tout copropriétaire peut également adresser une demande écrite au syndic pour obtenir un document spécifique (ex. contrat de maintenance d’un équipement, devis, facture). Le syndic doit répondre dans un délai raisonnable (en général un mois).
Pour les copropriétaires non membres du conseil syndical, les droits sont plus limités. Ils peuvent consulter les documents de la copropriété uniquement à des moments précis, définis lors de l’assemblée générale précédente. En général, cette consultation se fait dans les jours précédant l’AG, afin de permettre la vérification des comptes. Le syndic doit garantir une plage horaire suffisante pour que les copropriétaires puissent examiner les pièces. 📝
En dehors de ces périodes, les copropriétaires ont toutefois accès à certains documents via l’extranet obligatoire, tel que prévu par la loi ALUR. Cela inclut les règlements de copropriété, les diagnostics techniques, les plans pluriannuels de travaux ou encore les PV d’AG. Cette dématérialisation vise à simplifier l’accès aux informations essentielles tout au long de l’année.
Refus du syndic : quelles solutions ?
Si le syndic refuse, retarde ou filtre de manière abusive la communication des documents, plusieurs recours sont envisageables :
1. Mise en demeure formelle
Envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception rappelant les obligations légales (articles 18, 21, 26 précités). Mentionner les textes et demander communication dans un délai de 30 jours.
2. Saisine du tribunal judiciaire
En cas d’inertie persistante, un copropriétaire peut saisir le tribunal judiciaire (ancien TGI) pour faire ordonner la communication sous astreinte. La procédure peut se faire avec ou sans avocat selon le montant du litige (<10 000 €).
3. Pénalités financières (Loi ELAN)
La loi ELAN (2018) a instauré une sanction pécuniaire :
15 € par jour de retard à compter du mois suivant la demande, dès lors que le syndic n’a pas fourni les documents devant figurer dans l’extranet.
Cette pénalité est prévue à l’article 18 de la loi de 1965, modifié par la loi ELAN.
4. Changement de syndic
Enfin, si le refus de communication est récurrent ou traduit une opacité de gestion, il est possible de mettre le syndic en concurrence. Un ou plusieurs copropriétaires peuvent inscrire à l’ordre du jour de la prochaine AG la désignation d’un nouveau syndic (art. 10 du décret de 1967).

Conclusion
La transparence dans la gestion de la copropriété est une obligation légale, non une faveur du syndic. Les copropriétaires, seuls ou collectivement, disposent d’outils juridiques solides pour exiger la communication des documents, prévenir les abus et garantir une gouvernance équitable.
✨ Conseil pratique : Si vous faites partie du conseil syndical, organisez chaque année une consultation complète des documents avec rédaction d’un rapport pour l’AG. Cela incite à la rigueur… et facilite le contrôle.