Négligence sur les impayés de charges : risques
La négligence dans la gestion des impayés de charges constitue l’une des fautes les plus préoccupantes que peut commettre un syndic de copropriété. Trop souvent sous-estimée, elle peut engendrer de graves déséquilibres financiers pour l’immeuble, mettre en péril son entretien courant, et générer des tensions durables entre copropriétaires. Dans un contexte économique parfois tendu, où les charges sont lourdes à supporter, il est essentiel que le syndic joue pleinement son rôle pour préserver l’équilibre budgétaire et l’intérêt collectif.
Qu’est-ce que la négligence dans la gestion des impayés de charges ?
La négligence dans la gestion des impayés de charges désigne l’inaction ou le laxisme du syndic face aux défauts de paiement de certains copropriétaires. Cela peut se traduire par l’absence de relances écrites ou téléphoniques, le refus d’engager des procédures judiciaires (injonction de payer, saisie, etc.), ou encore le défaut de signalement des impayés en assemblée générale.
Il s’agit d’une faute de gestion, car le syndic a l’obligation de défendre les intérêts financiers du syndicat des copropriétaires. Lorsqu’il laisse des impayés s’accumuler sans réagir, les autres copropriétaires se retrouvent contraints de compenser ces manques à gagner. 😤
Exemple concret : une copropriété en difficulté
Prenons l’exemple d’un immeuble de 15 lots situé à Lyon. Sur l’exercice comptable 2022-2023, trois copropriétaires ne règlent pas leurs charges trimestrielles, représentant un total de 8 500 €. Le syndic, informé dès le premier trimestre, se contente d’envoyer une lettre simple sans relance en recommandé, ni mise en demeure.
Au fil des mois, la trésorerie de la copropriété devient insuffisante pour régler les factures de chauffage et d’ascenseur. La chaudière tombe en panne, l’ascenseur est mis à l’arrêt temporairement faute d’entretien. Résultat : inconfort, perte de valeur des biens, et tensions lors de l’assemblée générale. 😠
Cadre légal : les obligations du syndic
Le syndic professionnel est soumis aux règles prévues par la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, ainsi qu’au décret du 17 mars 1967.
Selon l’article 18 de la loi de 1965, le syndic est chargé d’assurer l’exécution du règlement de copropriété, des décisions d’assemblée générale, et notamment de « recouvrer les charges et les avances dues au syndicat ». Il dispose de tous les moyens légaux à cet effet : relances, commandement de payer, injonctions de payer, saisies conservatoires, etc.
Depuis la loi ELAN (2018), le syndic doit également présenter un état détaillé des impayés lors de l’assemblée générale. L’article 29-1 de cette même loi autorise le syndicat à se substituer à un syndic défaillant si l’intérêt collectif est menacé.
Conséquences juridiques pour le syndic
Lorsqu’un syndic est défaillant dans ses missions, sa responsabilité civile professionnelle peut être engagée. Les copropriétaires peuvent, à travers le conseil syndical ou en assemblée générale, exiger des explications, demander réparation, voire saisir le tribunal judiciaire pour faute de gestion.
Le syndic peut être condamné à indemniser le syndicat si sa négligence a causé un préjudice financier mesurable. 💸
Par ailleurs, une telle carence peut également motiver un non-renouvellement du mandat ou une révocation anticipée, même en cours d’exercice.
Quels recours pour les copropriétaires ?
Lorsqu’un ou plusieurs copropriétaires constatent une inertie du syndic face aux impayés, plusieurs options s’offrent à eux :
- Interpellation écrite par le conseil syndical pour obtenir des explications.
- Inscription d’une question à l’ordre du jour de l’assemblée générale.
- Demande de révocation du syndic pour faute de gestion.
- Recours judiciaire pour mise en cause de sa responsabilité civile professionnelle.
- Nomination d’un administrateur provisoire en cas de blocage grave.
Ces démarches doivent être documentées, étayées de preuves (relevés de compte, correspondances, PV d’assemblées), et menées dans le respect des procédures légales. 📂
Procédure à suivre : étape par étape
- Demande d’explication formelle adressée au syndic (lettre recommandée avec AR).
- Réunion du conseil syndical pour faire le point sur la situation financière.
- Mise en demeure du syndic de procéder aux relances et actions de recouvrement.
- Inscription d’une résolution à l’ordre du jour de la prochaine assemblée générale (remise en concurrence, révocation, etc.).
- Si refus ou inaction persistante, saisine du tribunal judiciaire.
- En parallèle, les copropriétaires peuvent exiger un audit de gestion.
- Rédaction d’un nouveau contrat de syndic, si besoin.
Exemple de lettre de mise en demeure au syndic
Nom Prénom
Adresse
Code postal – Ville
À l’attention de [Nom du syndic]
Syndic de copropriété
Adresse du cabinet
Code postal – Ville
[Ville], le [Date]
Lettre recommandée avec accusé de réception
Objet : Mise en demeure pour carence dans la gestion des impayés de charges
Madame, Monsieur,
Nous avons constaté, depuis plusieurs mois, une absence de relance efficace et d'action en recouvrement à l'encontre de copropriétaires débiteurs dans notre immeuble sis [adresse de la copropriété]. Cette situation met en péril la santé financière de notre copropriété.
Conformément à l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, vous avez l'obligation de procéder au recouvrement des charges. Votre inaction constitue une faute de gestion manifeste.
Nous vous mettons donc en demeure, par la présente, d'engager sans délai toutes les procédures nécessaires au recouvrement des sommes dues (lettres de relance, commandement de payer, injonction, etc.), sous peine de poursuites judiciaires.
Dans l’attente de votre retour dans un délai de 15 jours, nous vous prions d’agréer, Madame, Monsieur, nos salutations distinguées.
Signature
Conclusion : une vigilance indispensable
La négligence dans la gestion des impayés de charges n’est pas une simple erreur administrative. Elle peut sérieusement compromettre l’équilibre financier d’une copropriété et entraîner des conséquences juridiques lourdes pour le syndic fautif. Pour les copropriétaires, la vigilance, la transparence et l’action collective sont les meilleurs remparts contre l’inaction.
💡 Une copropriété bien gérée est celle où chaque acteur joue pleinement son rôle : les copropriétaires en tant que payeurs responsables, et le syndic en tant que gestionnaire rigoureux.